Photographies de Luana Bassil & Gaspard de Spoelberch
Une exposition centrée sur le Liban et sa jeune génération expatriée, orchestrée par Virginie de Borchgrave qui tentera de partager les points de vue de deux photographes : Luana, une autochtone magnétisée par son pays depuis qu’elle l’a quitté et Gaspard, un allochtone durant son premier voyage là-bas.
LUANA BASSIL est une jeune cinéaste et photographe libanaise (1993), née et élevée à Beyrouth au Liban. Elle a passé son enfance à découvrir des cinéastes et développe, dès son plus jeune âge, une passion pour le cinéma. Tout au long de sa jeunesse, elle prenait des photos argentiques de son entourage. Aujourd’hui, elle réside à Bruxelles où elle poursuit sa carrière de photographe.
Son travail sur le Liban repose sur une dimension poétique. Pour échapper aux défis politiques et personnels auxquels elle est confrontée, Luana trouve refuge dans les véritables richesses de son pays, à savoir la mer et les montagnes. À travers ses photos, l’artiste cherche à s’éloigner de la réalité difficile et complexe de la politique libanaise, nous amenant subtilement vers ce qu’il y a de plus authentique : le corps et la nature, loin des vicissitudes d’un pays en souffrance.
Ses œuvres captent la beauté et l’authenticité de la vie quotidienne, offrant un refuge poétique, apaisant et sincère.
Bassil a travaillé avec des créateurs comme Diane Von Fürstenberg, Lara Khoury et Alexandra Hakim ; des artistes belges comme Philippine d’Otreppe et Madeleine Schilling.
Elle a exposé son travail dans diverses galeries d’art à Beyrouth et à Paris.
Laissons-lui la parole :
« Il y a quatre ans, mon pays est tombé dans l’une des plus grandes crises économiques de son histoire. Puis, il y a trois ans, alors que le monde entier était confronté à une pandémie mondiale, l’explosion du port de Beyrouth a eu lieu. Elle a détruit ma ville et changé nos vies à jamais. C’est à ce moment-là que j’ai senti que ma santé mentale avait un réel impact sur ma vie et que j’ai commencé à y voir des changements.
J’ai toujours été intéressée par les thèmes de la mémoire, du passé et de la nostalgie. J’ai mon bagage d’enfance que je porte sur les épaules et ai compris, petit à petit, que nous devions apprendre à vivre avec nos propres fantômes. Il y a une dimension selon laquelle le traumatisme personnel est un microcosme du sociétal.
Les traumatismes nous ont été transmis par nos parents et nos grands-parents, par ce qu’ils ont traversé, mais aussi par des choses que l’on peut observer aujourd’hui, que ce soit de l’état d’un bâtiment ou la normalisation des événements.
J’ai eu une relation amour/haine avec mon pays au cours des dernières années : de la haine à cause de ce qu’il nous fait subir, des politiciens qui sont encore au pouvoir, même après la grande révolution de 2019 – 2020, de l’état dans lequel il nous maintient ; et de l’amour parce que cela peut être le meilleur endroit au monde, la culture, les gens, l’accueil chaleureux, unique qui y règne.
Une question qui me tourmente depuis quatre ans ici à Bruxelles, c’est comment – ou peut-être pourquoi – nos parents sont revenus à Beyrouth pendant la guerre civile et ont combattu, et nous, presque toute notre génération est partie. Il est difficile d’être loin de chez soi et de ne pas savoir si un jour on reviendra, si les choses se stabiliseront là-bas dans le futur, pour que nous puissions tous retourner, vieillir avec nos parents et nos amis au même endroit.
Gaspard est venu à Beyrouth pour la première fois, avec toute une équipe belge l’été dernier, et il y avait quelque chose de très rafraîchissant à ce sujet. Ce n’est pas anodin de montrer votre pays à des personnes qui ne le connaissent pas car cela vous rappelle non seulement pourquoi vous l’aimez mais aussi la beauté que vous avez tendance à ne plus voir lorsque vous êtes immergés par tout le contexte qui l’entoure.
Quand il m’a dit qu’il voulait faire une exposition sur le Liban, j’étais très heureuse. J’ai senti que c’était la première fois depuis très longtemps que j’étais prête à montrer ce travail, différent et plus personnel que mes projets habituels. »
GASPARD de SPOELBERCH est un photographe belge basé au Portugal.
Sa passion pour la nature et les voyages a orienté son travail vers la photographie paysagère et vivante. Sa sensibilité aux textures et aux couleurs l’a attiré vers la photographie argentique, où il crée des images esthétiques, en partie grâce à une profondeur de champ et un cadrage soigné.
Il explore à la fois le macro et le micro univers, capturant tout autant de vastes paysages que des détails en gros plan dont il extrait sens et émotion.
Passionné tant par la formation de la nature et son aspect géologique que sa préservation à long terme, son approche tente avant tout de les traduire en images.
Gaspard essaie d’orienter son travail vers des projets ayant un impact culturel, ce qui l’amène à visiter des endroits tels que le Maroc, les Açores, le Liban, etc.
Écoutons-le :
« Le Liban a toujours été pour moi un sujet de confrontation et de discussions politiques dont j’avais, jusqu’à récemment, peu de compréhension.
La complexité historique et géopolitique de ce pays est liée à son emplacement et, en même temps, c’est ce qui a forgé son identité, un mélange culturel unique de religions, de races, de peuples. J’avais par contre déjà rencontré beaucoup de Libanais expatriés partout où j’allais et leur personnalité bienveillante, généreuse, ouverte aux autres m’avait interpellé. Leurs récits du Liban étaient toujours partagés entre un profond amour pour leur pays, ayant traversé tellement de périodes tourmentées, autant qu’un regard critique acerbe sur les choses.
Quand j’ai eu l’occasion d’y aller grâce à Luana, je me suis plongé dans son histoire entre autres avec “Tant qu’il y aura des cèdres”, le roman de Pierre Jarawan, un voyage initiatique passionnant doublé d’un chant d’amour émouvant. Entouré de Luana et de ses amis libanais expatriés, j’ai découvert le pays, la vallée de la Bekaa, les forêts primaires de cèdres, etc. J’ai vécu et senti certaines choses. J’ai surtout rapidement réalisé que ce voyage serait plus qu’une simple aventure entre amis…
Voici, avec la sensibilité avant tout visuelle qui est la mienne, le ‘récit’ personnel d’un premier contact avec le Liban. »
Du 29 mars au 7 avril 2024
Vernissage le jeudi 28 mars de 18h à 21h
Rencontre avec l’ONG Beirut Beitna le mercredi 3 avril à 18h
Brunch le dimanche 7 avril à 12h
9, Rue Roffiaen
B- 1050 Bruxelles (Ixelles)
Ouvert du mardi au dimanche de 14h à 19h & sur rendez-vous
0495 93 73 83/ 0494 04 38 28. Fermé ces dimanche et lundi de Pâques 31/03