Ana Torfs. The Magician & the Surgeon **

Une salle plongée dans l’obscurité pour apprécier les trois vidéos et l’installation de l’artiste plasticienne belge (1963) qui a déjà exposé ici il y a 20 ans mais aussi au prestigieux K21 à Dusseldorf en 2010, au WIELS en 2014 et plus récemment à la Fondation Calouste Gulbenkian à Lisbonne en 2016. Elle nous parle de respiration, de vie, d’écho et de théâtre où comme dans ‘Sideshow’, au milieu d’un décor abstrait sous des lumières polychromes, apparaissent et disparaissent des personnages sans visage. A l’entrée, une vidéo attire notre attention sur la respiration et au dos de celle-ci, on devine les vains efforts d’un homme invisible qui cherche à donner vie à une poupée. Enfin, devant un beau tapis en laine noué à la main où l’on était, avant les mesures sanitaires, censé s’allonger un casque sur les oreilles l’on entend une voix féminine qui énumère une liste d’écrivains, comédiens, chanteurs, cinéastes, bref d’artistes en tous genres, discours entrecoupé de soupirs et de gémissements où l’on distingue des considérations sur le fonctionnement du corps humain ou l’état de la planète. La parole comme moyen de survie. Il y a matière à approfondir.   

Jusqu’au 1er novembre 2021

Philippe Vandenberg. Molenbeek ***

Avec des dessins, des dessins et encore des dessins parsemés d’écritures, de messages percutants, de références à l’histoire, colorés ou non, grand format ou non, des carnets de croquis exposés feuille par feuille dans une mise en scène en parfaite adéquation avec le lieu, je découvre le travail d’un artiste que je ne connaissais pas. 

Dans la veine des ‘peintres’ au feutre ou au crayon – difficile de ne pas penser à Cy Twombly, Walter Swennen et quelques autres -, le travail de Vandenberg (1952-2009) qui parcourt le monde pour se retirer ensuite dans son atelier de Molenbeek et exprimer ce qu’il a vu, senti, entendu, révolté se révèle intéressant, en plus de la dimension esthétique. Son regard qui s’indigne du fondamentalisme, de l’oppression et de la pensée unique émeut et ouvre surtout la voie à une réflexion sur les conflits planétaires et la complexité des grandes métropoles. Si l’on n’avait pas compris, l’exposition Molenbeek qui est sa première exposition monographique en Belgique se réfère à ses années bruxelloises.  

Jusqu’au 3 janvier 2021

Danser brut ****

Un thème original pour une exposition hors des sentiers battus. Quelle idée géniale que celle d’explorer le mouvement dans tous ses états et sous toutes ses formes : de la transe à l’hystérie jusqu’à des danses populaires aux origines complexes comme la fameuse tarantelle corse ou l’envoûtante pizzica du Salento dans les sud des Pouilles, en point d’orgue du dernier défilé croisière de Dior mis en scène à Lecce et diffusé dans le monde entier, laissant beaucoup de gens interloqués par ces femmes s’arrachant les cheveux et ses couples dansant de manière saccadée. L’exposition qui parle de tout sauf de danse classique ou moderne ne s’intéresse pas non plus à l’histoire de la danse. Elle explore les liens entre la danse et les mouvements involontaires répétitifs ou involontaires et analyse les différentes formes d’expression non seulement du corps mais aussi du visage et des mains, très significatifs de la personnalité de tout un chacun, malade ou bien portant.

Entre art brut et art contemporain, on visionne quantité de vidéos dont celles du documentaire sur un spectacle du célèbre chorégraphe belge André Platel ou un film de Charlot dans le volet de l’exposition « Charcot à Charlot ». En découvrant les dessins du danseur Vaslav Nijinsky des Ballets Diaghilev qui l’ont empêché un temps de sombrer dans la folie, on peut imaginer combien le mouvement du crayon sur le papier peut se substituer à celui du corps. 

La danse comme un langage individuel aussi universel qu’unique selon les différentes cultures, époques, états d’âme et esprit. Passionnant !     

Jusqu’au 10 janvier 2021

Texte & Photos Virginie de Borchgrave

Bozar / Palais des Beaux-Arts

23, Rue Ravenstein

B-1000 Bruxelles

Ouvert du mardi au dimanche de 10h à 18h

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